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Vidéos d'information sur le Covid-19 : nos experts répondent à vos questions
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Qu'avez-vous observé avec les patients de la première vague?
Les résultats de la première vague ont montré que ces patients avec encéphalopathie, ces comas, ces syndromes confusionnels, avaient des anomalies très particulières quand on regardait d'une part leur cerveau et d'autre part, quand on regardait leur liquide céphalo rachidien. Quand on regarde le cerveau, on a mis en évidence que 85% de ces patients présentaient une inflammation au niveau des vaisseaux, ce qui a permis par la suite de proposer un traitement anti-inflammatoire à très haute dose pour éteindre cette inflammation. Sur le plan biologique, au niveau du liquide céphalo rachidien, on n'a jamais trouvé de preuve du virus. On a vu simplement ce qu'on appelle une rupture de la barrière hémato encéphalique. Qu’est-ce que la barrière hémato encéphalique? C'est une barrière virtuelle entre le sang et le cerveau.
Dr Gilles Allali du Service de neurologie des HUG
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Qu'est-ce que le SACRE?
Le SACRE, c'est un acronyme que l'on a proposé à Genève pour SArs-Cov-2 - le virus -, « RElated » en anglais, Encéphalopathie. C’est cette encéphalopathie, qui regroupe un spectre de présentations cliniques. On a découvert ce SACRE chez des patients lors de la première vague qui avaient été intubés aux soins intensifs en raison d'un problème pulmonaire sévère et au moment de lever la sédation, on s'aperçoit qu'ils ne se réveillent pas, qu’ils restent dans le coma. Parallèlement, dans les Unités conventionnelles, on fait le lien avec d'autres patients qui n'étaient pas aux soins intensifs, mais qui avaient des délires, qui avaient des troubles cognitifs. Et on s'est très rapidement dit qu’il s’agit peut-être de la manifestation du même problème. Simplement, la sévérité est différente. Aux soins intensifs, on a des retards de réveil, on a des comas. Dans les soins intermédiaires, on a des patients qui se présentent avec des troubles cognitifs ou des épisodes délirants. On a eu des patients qui racontaient des histoires complètement farfelues.
Dr Gilles Allali du Service de neurologie des HUG
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Quel est l'impact neuropsychologique du Covid-19?
C'est une question sur laquelle on travaille actuellement. La Dre Julie Péron et le Pr Frédérique Assal ont eu un financement du Fonds National Suisse au mois de juin, pour phénotyper et répondre à cette question. Le but de ce projet est d'évaluer à 6 et 12 mois ces patients de la première vague, mais on inclura aussi ceux de la deuxième vague, afin de répondre à cette question, de voir, 1, est ce qu'ils conservent des séquelles neuropsychologiques. Et 2, est-ce qu'on observe à l'imagerie des anomalies qui auraient été laissées par le virus ? Ce qui est intéressant dans cette étude, c'est que l'on va comparer les groupes. On va comparer les patients qui sont passés aux soins intensifs, qui ont eu un Covid sévère, avec des patients qui n'ont pas été aux soins intensifs, mais qui ont été hospitalisés, qui ont eu un Covid modéré, versus la majorité des patients qui n'ont pas été hospitalisés, qui ont eu un Covid que l’on va qualifier de léger. Même s'il n'est pas forcément léger pour les patients qui sont restés chez eux pendant plusieurs jours avec des fièvres hautement élevées.
Dr Gilles Allali du Service de neurologie des HUG
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Pourquoi le Covid-19 atteint-il plusieurs organes différents?
Le point commun pour répondre à cette question, ce sont les vaisseaux. Notre hypothèse pour expliquer ce que l'on a appelé le SACRE, c'est une endothélite, une inflammation de la paroi du vaisseau. Des vaisseaux il n'y en a pas que dans le cerveau, il y en a dans tous les organes. Il y en a dans les poumons, dans les reins. Cette endothélite, d’ailleurs, initialement, n'a pas été décrite dans le cerveau. Les premières données pathologique, où l’on a regardé les organes, n'étaient pas dans le cerveau. On a décrit ces endothélites, cette inflammation, dans les vaisseaux, dans les reins, dans les poumons. C'est seulement dans un deuxième temps, plusieurs mois après, lors des premières autopsies où l’on voit une inflammation de l'endothélium. Ce sont les espagnols qui vont nous montrer que, ce que l'on voyait dans les reins, on le voit aussi dans le cerveau.
Dr Gilles Allali du Service de neurologie des HUG
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Les pertes du goût et de l'odorat constituent-elles une atteinte neurologique?
Tout à fait, l'olfaction c'est le premier nerf crânien dont les terminaisons nerveuses sont dans les narines. Une des hypothèses que l’on s'était faite d'ailleurs avant de Covid-19 pour les autres coronavirus, c'était que le neuro tropisme de ces coronavirus rentrait par la lame criblée, par le nez, et allait atteindre le cerveau. C'est une des hypothèses, une des portes d'entrée suspectées du virus, via le cerveau. Ce n'est pas parce que l’on a perdu l'olfaction et le goût que l’on va avoir des séquelles neurologiques. On pense que c'est dû à la neutralisation de certains récepteurs et ça ne veut pas dire qu'on va trouver, ou qu'on trouve, des traces du virus dans le cerveau.
Dr Gilles Allali du Service de neurologie des HUG
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Les personnes souffrantes de cancer sont-elles plus vulnérables face au Covid ?
Oui, globalement, les patients cancéreux sont vulnérables au Covid. Ils n'ont pas forcément plus de risques d'attraper la maladie. Par contre, la maladie Covid va être plus sévère chez eux pour de multiples raisons liées d'une part à la maladie, à leur état général, mais aussi parfois à un certain nombre de traitements qu'ils reçoivent. Et on sait aujourd'hui, malheureusement, que la mortalité liée au covid chez les patients cancéreux est supérieure à la mortalité dans la population générale. Nous avons donc d'une part une maladie Covid qui est plus grave chez des patients cancéreux ; mais il y a une autre conséquence, c'est qu'un patient cancéreux a souvent de la difficulté à éliminer le virus et de ce fait, on ne peut pas faire les traitements qui devraient être fait pour la maladie cancéreuse. On peut prendre le cas de leucémies, de lymphomes, de cancers du testicule pour lesquels les traitements de type chimiothérapie sont absolument essentiels. C'est clair qu'on ne peut pas réaliser ces traitements chez un patient qui n'a pas éliminé son virus. Et ce retard au traitement lié au Covid est probablement une cause supplémentaire de l'excès de mortalité par le Covid chez des patients cancéreux. Et c'est pour ça que les Départements d'oncologie des HUG et du CHUV ont fait tellement d'efforts pour prévenir toute source d'infections, de contaminations potentielles au sein de leur structure.
Pr Pierre-Yves Dietrich, médecin-chef du Département d'oncologie des HUG
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La vaccination contre le Covid est-elle conseillée aux personnes atteintes de cancer ?
Globalement, la réponse est formellement oui. On sait que la maladie covid est plus grave chez les patients cancéreux. On sait aussi que la maladie covid va potentiellement empêcher la réalisation de traitements importants pour le patient. Globalement, il faut recommander fortement aux patients souffrant de cancer de se faire vacciner. Il peut y avoir des exceptions où un temps optimal pour la vaccination à définir. C'est la raison pour laquelle il est vraiment important que les patients en discutent avec leur oncologue ou leur hématologue traitant.
Pr Pierre-Yves Dietrich, médecin-chef du Département d'oncologie des HUG
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La vaccination contre le Covid est-elle efficace pour les personnes atteintes d’un cancer ?
La réponse est oui. Ce que l'on sait des études, c'est que les personnes qui ont eu un cancer ont exactement le même niveau de protection que la population générale. Les données sont un peu plus fragiles pour les patients qui sont en cours de traitement oncologique. Pour ceux-là, on ne peut pas exclure que le niveau de protection soit un peu inférieur en raison de leur situation clinique, de la maladie et des différents traitements. Quoiqu'il en soit, ce qui est vraiment important de faire, parce qu'il y a beaucoup de possibilités différentes, c'est d'en parler avec votre oncologue pour définir quel est le meilleur moment pour le vaccin. Dans la très grande majorité des cas, la question n'est pas « est-ce qu'il faut vacciner ? » mais « quel est le meilleur moment ? ».
Pr Pierre-Yves Dietrich, médecin-chef du Département d'oncologie des HUG
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La vaccination contre le Covid peut-elle présenter des risques ?
Pour l'instant, il n'y a aucune indication dans ce sens, il n'y a pas vraiment de raison pour que les patients souffrant de cancer aient plus d'effets secondaires et de risques que la population générale. La situation pour laquelle on manque peut-être encore un tout petit peu de données c’est sur les patients qui sont sous immunothérapie. L'immunothérapie consiste à stimuler le système immunitaire. Pour ces patients il est important de définir le meilleur moment de la vaccination et nous suivrons de manière très précise ces patients après le vaccin. Mais il n'y a pour l'instant absolument aucun indice d'une augmentation des effets secondaires chez ces patients.
Pr Pierre-Yves Dietrich, médecin-chef du Département d'oncologie des HUG