Plus de trois quarts des personnes interrogées lors d’une enquête menée en mars 2021 aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), en collaboration avec l’Université de Genève (UNIGE), étaient favorables au vaccin contre le Covid-19, même si la majorité hésite encore pour leurs enfants. Motivées principalement par un retour à la vie normale, les personnes avec un bon niveau d’éducation, une bonne situation économique, un âge avancé ou atteintes par une maladie chronique, sont les plus nombreuses à l’accepter. Cette étude révèle également que beaucoup de sondé·es, initialement sceptiques, ont changé positivement d’avis suite à l’ouverture de la vaccination. Cette enquête avait pour but d’investiguer les déterminants sociodémographiques et cliniques des prises de positions relatives au vaccin au sein de la population genevoise, afin de mieux comprendre les raisons de son acceptation ou de son refus. Des résultats à lire dans la revue MedRxiv.
Cette étude évalue la perception de la population genevoise au sujet de la vaccination contre le Covid-19 trois mois après le lancement du programme de vaccination en Suisse. Elle est issue du groupe de personnes suivies longitudinalement dans le cadre de l’étude Specchio-COVID19. Les 4’067 participant·es ont répondu à une enquête en ligne entre le 17 mars et le 1er avril 2021.
Influence du statut social et de la santé
Les résultats de l’étude démontrent que l’acceptation de la vaccination Covid-19 se montait à 75,7 %. Elle était plus élevée chez les personnes de 50 ans et plus, à haut revenu, vivant dans des zones urbaines et semi-urbaines ou ayant suivi un enseignement supérieur. Les personnes avec des maladies chroniques étaient également plus nombreuses à l’accepter. « Il est raisonnable de penser qu’elles y étaient plus favorables parce qu’elles ont conscience d’être à plus haut risque de complication et qu’elles ont été plus vite ciblées par les campagnes de sensibilisation des autorités sanitaires », précise la première auteure de l’étude, Ania Wisniak, médecin interne de recherche à l’Unité d’épidémiologie populationnelle du Service de médecine de premier recours des HUG et chercheuse à l’Institut de santé globale de la Faculté de médecine de l’UNIGE. Ces résultats suggèrent qu’un meilleur ciblage des populations pourrait avoir un impact sur l’acceptation globale des vaccins.
« Bien que le taux d’acceptation vaccinale de cette enquête soit peut-être légèrement surestimé en raison du fait que les personnes avec un niveau socio-économique élevé et plus âgées participent plus volontiers à ce type d’enquêtes, ces résultats sont très importants car ils permettent de mettre en évidence les déterminants du choix vaccinal, de guider la communication et d’éclaircir les raisons qui motivent les refus et les hésitations », précise la Dre Ania Wisniak.
Retour à la vie d’avant
Les raisons les plus fréquemment invoquées par les personnes ayant l’intention de se faire vacciner étaient le désir de revenir rapidement à une vie normale, de se protéger eux-mêmes et leur entourage - voire la société toute entière - ou de voyager.
Anticipation craintive
L’argument le plus fréquemment invoqué par les personnes qui n’avaient pas l’intention de se faire vacciner était une «préférence pour l’attente». Une explication étayée par une envie de laisser la place aux plus vulnérables, d’avoir plus d’informations ou d’observer les conséquences éventuelles chez les personnes vaccinées.
Hésitation pour les enfants
Moins de la moitié des participant·es (45,6 %) ayant des enfants étaient disposé∙es à les faire vacciner contre le Covid-19 si – et seulement si la recommandation émane des autorités de santé publique. « Ce faible taux doit être relevé, même s’il faut aussi noter que l’enquête a été conduite à une époque où les données sur la vaccination des enfants manquaient. Lorsque la vaccination des enfants aura été approuvée, il sera important de communiquer avec des données précises sur les risques comparés d’une infection et de la vaccination », précise Silvia Stringhini, responsable de l’Unité d’épidémiologie populationnelle au Service de médecine de premier recours des HUG et professeure assistante au Département de santé et médecine communautaires de la Faculté de médecine de l’UNIGE.
Peu de vaccino-sceptiques
L’étude des HUG montre aussi que la majorité des 24,3% défavorable au vaccin contre le Covid-19 ne peut pas être qualifiée de « vaccino-sceptique », mais plutôt de personnes en attente de décision. En effet, uniquement 13% d’entre elles refusent de manière générale tout type de vaccin.
Rassurer sur les bénéfices des vaccins
En réponse à la pandémie de Covid-19, des efforts mondiaux sans précédent ont permis le développement de plusieurs vaccins. Toutefois, les campagnes de vaccination font actuellement face à une méfiance de la population et à des messages de désinformation mettant en doute la sécurité et l’efficacité des vaccins.
« Comme la volonté de la population de se faire vacciner est essentielle, il était primordial de comprendre les raisons de l’acceptation ou du refus de la vaccination. Cette démarche doit se faire localement. Car les résultats obtenus dans d’autres pays ne peuvent pas toujours être généralisés, en raison des facteurs culturels, politiques et logistiques qui les influencent », indique Ania Wisniak.
Informer les indécis∙es
« La désinformation a certainement influencé le refus du vaccin Covid-19. Nous pouvons donc agir en conséquence », dit Ania Wisniak. Pour corroborer ses propos, l’étude met en avant un changement dans l’intention vaccinale. En effet, davantage de personnes changent d’avis en faveur de la vaccination que l’inverse au fur et à mesure de l’avancement des campagnes de vaccination.
L’équipe de recherche prévoit d’affiner encore ses résultats en réitérant le même questionnaire d’ici quelque mois, afin de mesurer l’évolution des intentions vaccinales. « Notre ambition est de fournir des informations pertinentes à la population encore hésitante », conclut Idris Guessous, médecin-chef du Service de médecine de premier recours des HUG et professeur associé au Département de santé et médecine communautaires de la Faculté́ de médecine de l’UNIGE.
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