Amputée d’un pied suite à un accident de la route, Sandrine peut aujourd’hui tout faire avec ses différentes prothèses.
Eté 2010. Une fin de journée comme beaucoup d’autres. Seulement cette fois, sur son scooter, Sandrine termine sa course contre un bus : jambe écrasée. Quelques heures plus tard, elle sort de la salle d’opération avec un gros pansement. « Je ne savais pas ce qui restait de ma jambe », se souvient-elle. Et la réponse ne tarde pas à tomber : « On n’a pas pu sauver votre pied. » S’ensuivent six semaines d’hospitalisation et huit autres passages au bloc entrecoupés d’une vingtaine de séances au caisson hyperbare – les HUG sont la référence suisse en oxygénothérapie – pour régénérer les tissus. « On a gardé la plaie ouverte le plus longtemps possible pour sauver le maximum de ma jambe. Finalement, j’ai conservé mon tibia et j’ai été amputée au-dessus de la malléole », dit-elle.
Il y a eu le choc de la perte du pied. Des accès de pleurs aussi. Brefs et fréquents. Malgré tout, Sandrine ne conserve pas un mauvais souvenir de cette période. « Médecins, infirmières, physiothérapeutes… j’étais tellement entourée que ça allait bien. Ma famille et mes amis venaient me voir tous les jours et on se faisait même des soirées film dans ma chambre avec des copines. J’avais tellement de visites et de traitements que je n’ai pas eu le temps de m’apitoyer sur mon sort. »
Six mois de physiothérapie
Très vite, elle bouge, se déplace avec des cannes ou en fauteuil roulant, effectue des exercices sur une jambe. L’essayage, le moulage et la fabrication de la prothèse sont un passage obligé avant les séances de physiothérapie, complétées de musculation et de piscine. « On doit réapprendre à marcher. Au début, on croit qu’on n’y arrivera pas. Je m’étais fixé un objectif : réussir à marcher sans boiter. » Durant six mois, deux fois par semaine, Sandrine effectue des exercices de musculation, d’équilibre, de marche face au miroir pour bouger les jambes et les hanches de façon symétrique. Non sans mal. « Il faut prendre confiance en la prothèse pour appuyer autant sur les deux jambes. Avec un mollet qui s’atrophie, les douleurs sur les côtés de la jambe sont fréquentes. » Elle franchit seuils et obstacles, monte des escaliers sans se tenir aux barrières, arpente des surfaces inégales. Toujours sous l’oeil attentif du physiothérapeute prêt à la corriger. Et auquel elle doit tout : « J’ai deux personnes qui ont été essentielles à ma reconstruction : mon physio qui m’a réappris à marcher et mon prothésiste. »
Grâce et non à cause
Avec ce dernier, fondateur de l’association Ananteo, qui réunit d’autres personnes amputées, elle se lance dans la course à pied, qu’elle pratiquait déjà auparavant. Là aussi, elle doit réapprendre des gestes spécifiques et à utiliser les deux jambes de la même façon. « Les personnes de l’association sont devenues un groupe très important dans ma vie. Je dis même que c’est ‹ grâce › et non ‹ à cause › de l’accident que je les connais. » Battante, elle fait de la randonnée en montagne, du bateau ou encore chausse des skis. « Je déteste ne pas pouvoir faire des choses à cause de l’accident. Cela aurait été même catastrophique de ne plus pouvoir pratiquer de sport. »
Comme avant
Aujourd’hui, quatre ans après son accident, Sandrine dispose d’une prothèse esthétique – « qui me permet de porter des pantacourts » – et d’une autre pour aller dans l’eau. « Je peux entrer seule dans une piscine, me baigner dans une rivière avec un sol pierreux ou monter et descendre d’un bateau sans aide. » Elle travaille à 50% et se sent bien physiquement. « Je fais en sorte que ma vie soit comme avant, même si tout est un peu plus compliqué. » Et l’image de soi ? « Je ne suis pas toujours très à l’aise. Quand je cours, j’assume bien. Les gens m’abordent, on discute et cela ne me gêne pas trop », répond-elle. Et d’ajouter ce qu’elle a appris au travers de cette épreuve: « Je suis capable de me dépasser, de relever des défis et j’ai beaucoup d’amis. »