Aline a passé un mois en Guyane avec cinq autres personnes, comme elle, souffrant de troubles psychiques. Un voyage thérapeutique très enrichissant.
« Marcher dans la forêt amazonienne, dormir en hamac, descendre le fleuve Maroni en pirogue. Et aussi, rencontrer des Amérindiens Wayana. Ou encore aller chercher le manioc avec les femmes et le cuisiner. Cela m’a ramenée à des choses simples. Une simplicité qui m’a beaucoup touchée. C’était magique ! » Aline Thomas, qui souffre d’un trouble de la personnalité borderline, est de retour d’un mois en Guyane. Mais au moment d’évoquer ce périple, terminé depuis fin octobre déjà, ses yeux bleus pétillent encore comme si elle y était : « Ce voyage m’a beaucoup appris sur moi-même, sur ma volonté, sur ce que je vaux. »
A l’origine du projet : Monique Bannier, infirmière spécialisée au département de psychiatrie. En 2007, de retour d’un voyage privé en Guyane, elle se dit qu’il faudrait le refaire avec des patients. Avec son collègue Serge Boulguy, elle crée l’association Aventure thérapeutique pour les personnes souffrant de troubles psychiques afin qu’elles vivent une expérience enrichissante, source possible d’un nouveau départ dans leur vie. Faute d’un soutien économique suffisant, coup d’arrêt. « A l’époque, je terminais le programme CARE (Comportements Autodommageables et Régulation Emotionnelle) et travaillais dans une fondation. Après plusieurs mois d’abstinence, cela devait être la cerise sur le gâteau. Ne pas partir en octobre 2008 a été une grande déception », relève Aline Thomas.
Saisir l’opportunité, mais les organisateurs y croient et trouvent le parrainage nécessaire en 2011. « J’ai été recontactée. Cette fois, j’étais mal. Je suivais un sevrage à Montana, mais je voulais saisir cette opportunité. Je me suis dit : il faut que je me remue et cela sera une occasion pour être mieux et avoir de nouveaux objectifs. » Elle part avec cinq autres personnes, souffrant de schizophrénie, de trouble bipolaire, dépression, etc. Ils sont accompagnés de quatre soignants, d’une équipe de la Radio télévision suisse (lire ci-dessous) et encadrés de guides, piroguiers et porteurs. « Nous sommes partis en adultes responsables, chacun avec son traitement. Chacun a fait l’effort d’accepter l’autre. On s’est découvert des choses communes et j’ai gagné des amitiés. Une expérience humaine fantastique. » Un parcours de quatre semaines dans un environnement sauvage et impressionnant qui force à l’humilité et oblige à la solidarité. « Je ne pensais pas pouvoir marcher cinq heures. Je me suis découvert des compétences physiques, des capacités à prendre des initiatives, à aider les autres. C’est important pour maintenant, quand je suis fragile, que j’ai mes doutes, que je suis dans l’inactivité ou me referme sur moi-même. » A 32 ans, Aline Thomas est encore suivie par un psychiatre. Elle ne sait pas quand elle trouvera une stabilité définitive : « Cela va prendre du temps, mais je suis convaincue que j’y arriverai. J’ai l’espoir de pouvoir faire quelque chose de ma vie. »