Son travail et sa présence sur les médias sociaux ont aidé Christine Bienvenu à mieux comprendre et accepter les traitements contre son cancer.
En 2010, la vie de Christine Bienvenu est bouleversée par un cancer du sein. Elle a 35 ans et deux enfants en bas âge. Exténuée par des semaines intenses de chimiothérapie et de chirurgie reconstructive, celle qui se décrit comme une geek réoriente sa carrière dans un domaine mieux adapté à son état. Passionnée d’internet et de communication, elle suit une formation en médias sociaux et communautés en ligne. Interview.
Après votre cancer, vous créez Seinplement Romand(e)s, une plateforme destinée aux personnes atteintes par le cancer du sein. Pour quelle raison ?
Pendant ma maladie, j’ai cherché du soutien et des informations sur les médias sociaux romands. Je n’ai rien trouvé. Des sites nord-américains ou francophones, oui. Mais romands, très peu. La Suisse, très à la pointe dans certains domaines, accuse un retard important en matière de santé et de médecine digitale.
En plus de votre blog, vous ouvrez une page et un groupe sur Facebook, ainsi qu’un compte Twitter. Comment utilisez-vous ces différents médias ?
Ma page Facebook est une vitrine. J’y poste des articles sur le cancer du sein. J’y ai créé aussi un groupe auquel seuls des membres agréés peuvent accéder. Ce filtrage est nécessaire. Il permet d’éviter ceux qui souhaiteraient en profiter pour vendre des produits miracles par exemple. Twitter est davantage une sorte de haut-parleur. Grâce à ce média, je touche un public plus large et hétéroclite. On y trouve aussi davantage de professionnels de la santé ou de la communication.
Les communautés de patients – les fameux e-patients – disposent d’une influence grandissante dans les pays anglo-saxons. Est-ce aussi votre objectif ?
Je crois beaucoup en l’intelligence collective. La santé est un édifice qui se construit bien lorsque chacun y apporte sa pierre. Patients et soignants. Je considère les professionnels de santé comme des partenaires. En retour, j’aimerais qu’ils nous voient aussi comme tel. Le respect aveugle de la blouse blanche est contre-productif. En 2008, j’ai dû me battre, seule avec mon instinct de mère, pour que mon fils né avec le syndrome d’Asperger obtienne autre chose que le classique package « médicaments et psychothérapie ». Je me suis éduquée sur le sujet. Et c’est au sein des communautés de patients que j’ai trouvé le plus d’informations pertinentes.
Quelle est votre définition de l’e-patient ?
C’est d’abord un patient qui joue un rôle actif dans la prise en charge de sa propre maladie. Il dialogue avec son thérapeute et, par le biais d’Internet, avec d’autres personnes souffrant de la même pathologie. Davantage qu’informé, j’ai envie de dire qu’il est formé à sa maladie. Dans la relation avec le médecin, cela implique une remise en cause du traditionnel schéma paternaliste. C’est parfois difficile à accepter pour les praticiens.
Votre présence sur les médias sociaux a donc contribué à améliorer votre prise en charge ?
Ma réponse va vous surprendre : oui et non. En Suisse, le niveau des soins est de toute façon très élevé pour tous. En revanche, cela m’a aidée d’un point de vue subjectif. J’ai été une patiente active sur le plan intellectuel. Je comprenais les traitements reçus et j’étais mieux préparée à accepter ce qui se passait autour de moi.